Research Resources

Communiquer avec un partenaire à propos des résultats

Authors
Contributors
Chloe Lesieur
Summary

La réalisation d’une évaluation aléatoire implique une collaboration étroite et une communication régulière entre des acteurs multiples : chercheurs universitaires, personnel de recherche, partenaires de mise en œuvre, détenteurs de données administratives, décideurs politiques et membres de la communauté. Ces acteurs très divers ont des perspectives différentes et utilisent chacun leur propre langage spécialisé, ce qui peut rendre la collaboration difficile. Un dialogue efficace favorisant l’implication des partenaires augmente les chances que l’évaluation se déroule sans accroc et puisse avoir un impact sur les politiques publiques. Cette ressource rassemble les retours d’expérience et les conseils de nombreux chercheurs et membres du personnel en matière de mise en œuvre d’évaluations aléatoires.

Introduction

Communiquer les résultats aux partenaires de mise en œuvre et à tout autre acteur essentiel permet à ces derniers de modifier directement leurs activités, leurs politiques ou leurs procédures en conséquence, mais aussi de définir l’orientation des programmes à venir. La présente ressource donne des conseils aux chercheurs pour les aider à déterminer quand et comment communiquer avec leurs partenaires à propos des résultats et des indicateurs de progression d’une évaluation aléatoire. Une stratégie de communication soigneusement réfléchie, qui planifie les résultats à partager, ainsi que le calendrier et les modalités de ce partage, est un élément essentiel au maintien de relations solides avec les partenaires de mise en œuvre et autres intervenants clés. Or, de bonnes relations de travail entre les chercheurs et les parties prenantes sont cruciales pour favoriser l’impact du projet sur les politiques publiques, dans la mesure où les partenaires ont souvent une influence sur l’interprétation, la diffusion ou l’application éventuelles des données probantes générées par l’évaluation. La qualité de ces relations peut également avoir une incidence sur la disposition du partenaire à participer à d’autres recherches à l’avenir. Communiquer à propos des résultats est particulièrement important pour les raisons suivantes : 

  • Bonnes pratiques éthiques. Les sujets et les partenaires donnent de leur temps et fournissent des informations personnelles indispensables à la recherche. Veiller à ce que ces parties prenantes (ou leurs mandataires de confiance, comme un porte-parole ou les commanditaires de l’étude) soient informées des résultats de la recherche qui sont susceptibles de les concerner peut contribuer à justifier leur participation. Le rapport Belmont encourage la communication des résultats de la recherche aux sujets (National Commission for the Protection of Human Subjects, 1978).
  • Obligations contractuelles. Les accords d’utilisation des données, les conventions de subvention ou les Institutional Review Boards peuvent avoir des exigences en matière de divulgation ou de communication des résultats. 
  • Interprétation du contexte. Les partenaires peuvent contribuer de manière cruciale à l’interprétation des résultats de la recherche en expliquant des mécanismes ou des détails pertinents de l’intervention, de la mise en œuvre ou du contexte.

Le reste de cette ressource se compose des sections suivantes :

  1. Planification des échanges
  2. Phase d’intervention
  3. Post-intervention : les résultats finaux
  4. Politiques d’embargo
  5. Les composantes de la stratégie de communication

Planification des échanges

Lorsque vous commencez votre travail de planification avec un nouveau partenaire ou dans un nouveau contexte, assurez-vous de recueillir toutes les informations nécessaires et de planifier vos échanges avec le partenaire de recherche en tenant compte de ses besoins, de sa perspective et de sa réalité politique. Anticiper le point de vue du partenaire, ses motivations et les éventuels points de divergence dans l’interprétation des résultats vous permettra de préparer les discussions à venir et d’éviter ainsi les désaccords. Réfléchissez également aux conséquences que peut avoir la mise en avant de certains résultats et adaptez votre stratégie de communication en conséquence (si ce n’est pas en contradiction profonde avec les résultats scientifiques). Ce travail de préparation et de réflexion vous permettra de poser les bases d’un dialogue constructif tout au long du partenariat.

  • Identifiez les sujets particulièrement sensibles et documentez-les de manière à ce que le personnel de l’étude les ait toujours à l’esprit lorsqu’il aborde l’étude avec le partenaire ou d’autres publics non universitaires. Voici quelques exemples de sujets sensibles :
    • Les statistiques indiquant de mauvaises performances. Imaginons par exemple que les chercheurs constatent que 90 % du personnel d’un programme respecte les règles, et présentent cela comme un résultat positif. Il est possible qu’un responsable du programme se concentre au contraire sur le fait que 10 % de ses employés agissent de façon frauduleuse. 
    • Les résultats politiquement ou socialement sensibles. Bien que les chercheurs évaluent généralement un large éventail de variables de résultat dans le cadre d’une même étude, les documents de synthèse plus courts mettent souvent l’accent sur quelques « résultats clés ». Or, la sélection de ces « résultats clés » peut refléter des jugements normatifs. Par exemple, mettre en avant la baisse du pourcentage de familles monoparentales comme résultat significatif peut impliquer un jugement normatif sur la monoparentalité. 
    • Jargon économique et connotations dans la langue courante. Par exemple, le verbe « inciter » a une signification bien spécifique en économie. Cependant, dans la langue courante, il sous-entend que l’on « force » quelqu’un à faire quelque chose, ce qui peut se révéler particulièrement inadapté dans certains contextes de recherche. De même, le terme technique « marginal », tel qu’il est utilisé en économie, n’est pas forcément adapté à des contextes non universitaires où « marginal » signifie « insignifiant » ou « sans importance ». 
  • Tenez compte des dynamiques internes, des structures de pouvoir et des rapports hiérarchiques. L’ordre dans lequel vous informez les différentes personnes concernées peut affecter la qualité de vos relations. 
    • Par exemple, lorsque vous travaillez avec plusieurs entités au sein d’un même gouvernement, veillez à ce que le ministre de l’éducation soit informé des résultats d’un projet dans le domaine de l’éducation avant (ou en même temps que) le ministre de la santé. De même, faites en sorte que le ministre de la santé soit informé en priorité des résultats relatifs à la santé. 
    • Les hauts responsables souhaitent parfois être informés avant le personnel de terrain, ou inversement. 
  • Réfléchissez à la nature des informations que vous allez partager, ainsi qu’au calendrier et aux destinataires de ces partages. Les sections suivantes abordent les informations qui sont susceptibles d’être communiquées à chaque étape de l’intervention. 

D’autres composantes clés du plan de communication sont décrites plus bas, dans la section « Les composantes de la stratégie de communication »

Phase d’intervention

Au cours de cette phase, le chercheur n’a pas encore suffisamment de données pour produire les résultats finaux de la recherche. Il est possible que le recrutement ou la participation à l’intervention ne soient pas encore terminés, que la période d’étude ne soit pas encore écoulée ou que les données de fin d’étude ne soient pas encore disponibles. Partager des estimations d’impact provisoires, ou d’autres informations telles que des statistiques sommaires, des données de suivi et des indicateurs de processus, peut contribuer à maintenir le dialogue avec les partenaires. Cependant, communiquer ce type de données provisoires sans fournir suffisamment de contexte peut également compromettre l’intégrité de l’évaluation.

Il est possible que les responsables de la mise en œuvre souhaitent avoir accès aux résultats intermédiaires pour évaluer la sécurité de l’intervention et déterminer s’il est justifié de la poursuivre d’un point de vue éthique. D’un autre côté, les chercheurs peuvent être inquiets à l’idée que des décisions soient prises sur la base de résultats imprécis. Une solution à ce dilemme est évoquée plus bas, dans la sous-section « Suivi continu de la sécurité et de l’éthique ».

Partager des estimations d’impact provisoires

Partager des estimations d’impact provisoires peut : 

  • Maintenir le niveau d’engagement du partenaire et entretenir votre relation avec lui. 
  • Faciliter l’amélioration ou l’harmonisation de la mise en œuvre du programme. Il est possible que le partenaire de mise en œuvre parvienne à comprendre et à interpréter certaines différences entre les résultats en analysant les variations dans la manière dont le programme est mis en œuvre. Une telle analyse peut conduire à l’ajustement des directives et des plans de suivi, et donc à une mise en œuvre plus homogène du programme. 
  • Permettre au partenaire de prendre les décisions nécessaires sur le plan opérationnel ou politique. Les partenaires doivent régulièrement prendre des décisions concernant la gestion de leur programme et l’allocation de leurs ressources limitées. Il est possible que les priorités ou les conditions qui justifiaient initialement la recherche ne soient plus valables, par exemple si le programme obtient ou perd un financement, si les coûts augmentent ou diminuent, ou si le contexte politique évolue.

« Si l’étude n’est pas encore terminée ou publiée au moment où s’ouvre la fenêtre d’action, rédigez un rapport d’une page, qui doit être à la fois visuellement convaincant et dénué de jargon, pour en résumer les premiers enseignements à l’intention des décideurs politiques. Présentez-leur vos conclusions préliminaires en personne en leur précisant que ces résultats sont officieux et ne doivent pas être cités avant leur publication » (« Connecting Research To Policy » 2018).

  • Donner les moyens au partenaire de décider en toute connaissance de cause s’il est toujours éthiquement justifié de mener l’évaluation à son terme. Pour plus de détails, voir plus bas la sous-section « Suivi continu de la sécurité et de l’éthique ».
  • Donner l’occasion au partenaire de replacer les données ou les résultats dans leur contexte et de les interpréter. Cette contribution peut conférer une valeur supplémentaire au produit final de la recherche, par exemple en mettant en évidence d’autres trajectoires d’impact, en identifiant des questions de suivi pertinentes ou en mettant en lumière les limites des données. 
  • Faciliter la présentation des résultats finaux au partenaire. Le fait d’examiner ensemble les résultats intermédiaires et d’en discuter calmement, sans la pression d’une échéance imminente de publication ou d’examen, peut favoriser la mise en place d’un « processus d’apprentissage » collaboratif entre les chercheurs et les partenaires, plutôt qu’une succession d’évaluations aux enjeux considérables. Si les partenaires ont une vision plus nuancée de la manière dont les variables de résultat vont être évaluées et mesurées, ils seront potentiellement plus enclins à accepter les résultats finaux et à en discuter. 

 

 

Suivi continu de la sécurité et de l’éthique

Les partenaires de mise en œuvre et les comités d’évaluation éthique ne sont pas toujours à l’aise à l’idée de ne pas être informés de l’assignation du traitement ou des résultats intermédiaires de l’étude. En effet, le chercheur comme le partenaire peuvent être porteurs de biais inconscients : le désir qu’a le chercheur de publier un article et la foi du responsable de la mise en œuvre dans son programme peuvent les amener à minimiser les risques ou les événements indésirables. Un responsable de la mise en œuvre peut également interpréter des résultats positifs illusoires comme la preuve d’une réussite incontestable et chercher à mettre fin à l’étude. Et même si le chercheur ou le responsable de la mise en œuvre sont parfaitement objectifs, il n’est pas possible de prouver cette objectivité totale à des acteurs extérieurs.

Dans ce cas, un accord préalable spécifiant un certain nombre de conditions de divulgation ou de règles d’arrêt, ou encore la convocation d’un comité indépendant de surveillance des données et de la sécurité (Data Safety and Monitoring Board, ou DSMB), peut permettre de dissiper les inquiétudes. Les membres d’un DSMB ont un accès intégral aux assignations de traitement, aux données et aux estimations d’impact intermédiaires, de façon à pouvoir veiller à la sécurité des participants et à l’efficacité du traitement pendant la durée de l’étude. Contrairement aux responsables de la mise en œuvre, aux bailleurs de fonds ou aux chercheurs, leur seul mandat est de garantir la sécurité de l’intervention. En suivant des protocoles préétablis et en s’appuyant sur le jugement statistique d’experts, ils déterminent si les résultats intermédiaires indiquent que l’intervention est trop dangereuse pour être poursuivie ou trop bénéfique pour en priver certaines personnes.

Borg Debono et al (2017) répertorient les situations où les données peuvent être partagées, les parties prenantes avec qui elles doivent l’être et les risques que représente un tel partage. Voir le Tableau 2 de l’article.

Autres analyses de données à partager

Les activités de recherche, de planification et de suivi menées dans le cadre d’une évaluation aléatoire produisent généralement toute une série de résultats et de produits annexes. Bien que tous ces produits puissent être d’une importance minime pour les chercheurs jusqu’à la publication, ils peuvent aider les partenaires de mise en œuvre à mieux comprendre leur programme et leur public. Le partage de ces résultats peut favoriser l’engagement des partenaires et la prise de décision sans pour autant compromettre l’intégrité de l’étude.

Cependant, le fait de partager des estimations d’impact provisoires comporte également des risques. Pour limiter ces risques, les chercheurs doivent veiller à replacer les résultats dans leur contexte et les accompagner de mises en garde, mais aussi planifier de manière préventive des entretiens de suivi avec le partenaire. Lorsque l’équipe de recherche planifie sa stratégie de communication, elle doit donc évaluer soigneusement les risques et les avantages.

Risque pour la réputation. L’étude n’étant pas terminée, les résultats peuvent être amenés à changer. Ces changements peuvent avoir plusieurs origines : il est possible que les résultats intermédiaires soient sensibles à chaque nouveau point de données, que les résultats se manifestent au fil du temps, ou bien que l’équipe de recherche ait reçu des données nouvelles ou de meilleure qualité, mis à jour ses techniques d’analyse ou corrigé des erreurs de programmation. Toute discussion concernant des « résultats en cours d’élaboration » peut nuire à la réputation d’un chercheur qui, par ailleurs, produit des travaux précis et de grande qualité. 

  • Mesures préventives : Accompagnez les résultats d’une mise en garde en insistant sur leur caractère préliminaire, en expliquant la notion de puissance statistique et en évoquant les autres facteurs qui sont susceptibles d’influer sur les résultats.

Réaction du partenaire. Que ce soit conscient ou non, il est possible que le partenaire réagisse aux résultats intermédiaires d’une manière qui compromet l’étude ou introduit un biais. S’il découvre que les résultats sont nuls, il peut être amené à modifier l’intervention pour tenter de l’améliorer. À l’inverse, si les résultats semblent indiquer que l’intervention est efficace, le partenaire peut être incité à interrompre l’étude pour permettre aux membres du groupe témoin d’en bénéficier immédiatement. 

  • Mesures préventives : Anticipez les réactions potentielles du partenaire, discutez avec lui de ses inquiétudes et prévoyez ensemble des stratégies de réponse. Ces discussions peuvent aider le partenaire à faire la différence entre une décision stratégique essentielle et une réaction émotionnelle à des indicateurs non concluants. 

Règles de publication. La règle d’Ingelfinger et les politiques d’embargo scientifique qui en découlent s’appliquent aux études destinées à être publiées dans des revues médicales. Ces politiques d’embargo risquent d’être enfreintes si les médias publient les résultats d’une étude avant sa parution dans une revue universitaire, compromettant ainsi la possibilité d’une publication académique. Voir la section « Politiques d’embargo » ci-dessous pour plus d’informations à ce sujet.

  • Mesures préventives : Discutez dès le départ des règles de publication et de toute autre restriction contractuelle avec le partenaire et convenez ensemble d’une stratégie de communication. 

« Il peut s’agir de la synthèse d’une évaluation des besoins utilisée lors de la conception du projet dans laquelle le chercheur s’appuie sur des données existantes et/ou un travail qualitatif, d’une description de programmes similaires mis en œuvre dans d’autres pays, d’un rapport de référence contenant des données descriptives détaillées sur la situation au début du programme, ou encore de rapports réguliers issus des activités de suivi de la mise en œuvre du projet mises en place par les chercheurs » (Glennerster, 2015).

Voici quelques types de données ou d’informations que vous pouvez envisager de partager : 

  • Évaluation des besoins ou synthèse des données existantes ou du travail qualitatif réalisé
  • Études ou travaux connexes découverts dans le cadre des revues de la littérature
  • Données de référence contenant des statistiques descriptives sur le programme, le problème ou la population cible
  • Données de suivi et de mise en œuvre, comme :
    • Le taux d’inscription, la rétention, les indicateurs de qualité, l’adhésion, la conformité, l’attrition 
    • Les taux ci-dessus par sous-groupe ou par zone géographique.

Post-intervention : les résultats finaux

À ce stade, les chercheurs sont en possession des résultats de l’étude et d’un projet d’article ou de présentations prêts à être soumis à une revue, publiés comme document de travail, ou présentés dans le cadre d’ateliers ou de conférences.

La manière dont les résultats scientifiques sont présentés et analysés est généralement très éloignée de la perspective et des attentes du partenaire de mise en œuvre. Envoyer un manuscrit au partenaire sans lui fournir de cadre d’interprétation ni lui expliquer le jargon scientifique peut le conduire à interpréter les résultats de manière erronée ou négative et provoquer des tensions inutiles. Afin de créer un environnement propice aux questions, aux clarifications et à l’analyse du contexte universitaire, nous vous suggérons de prendre les mesures suivantes avant la publication :

  • Communiquer les résultats finaux en personne ou par téléphone. Communiquer les résultats dans le cadre d’une conversation ou d’une présentation donne l’occasion aux chercheurs et aux partenaires d’en évoquer ensemble les implications, plutôt que de laisser les partenaires interpréter seuls les résultats sans aucune explication. 
  • Aborder le point de vue et les inquiétudes du partenaire. Envisagez d’apporter les modifications qui vous semblent pertinentes et adéquates au projet d’article ou aux documents. 
  • N’envoyer le manuscrit ou les documents écrits qu’après avoir expliqué les résultats de vive voix. Le fait d’entendre décrire les résultats dans des termes simples et accessibles peut aider les partenaires à replacer les documents scientifiques dans leur contexte et à les interpréter.

Lorsque les résultats de l’étude sont nuls ou « décevants », il est particulièrement important de fournir des orientations au partenaire et de l’aider à mettre les choses en perspective. On peut par exemple l’aider à envisager ces résultats comme une opportunité d’apprentissage et d’amélioration de son programme, plutôt que de considérer ce dernier comme un échec. Les chercheurs peuvent également proposer d’aider le partenaire à élaborer un plan d’apprentissage et à réaliser ou à intégrer d’autres recherches afin d’améliorer son programme. Les organismes de mise en œuvre ont à cœur d’atteindre leurs objectifs et sont engagés vis-à-vis de la communauté qu’ils desservent, mais ne sont pas forcément attachés à un mode de fonctionnement particulier. En outre, ils sont généralement enclins à voir les aspects positifs de leur propre travail.

Les chercheurs peuvent également envisager le format de la « data walk », utilisé par certains projets communautaires de recherche participative pour favoriser l’engagement et la compréhension approfondie des partenaires et des membres de la communauté (Murray, Falkenburger, et Saxena 2015).  

Outre le partage des documents scientifiques comme les résultats finaux des analyses, les manuscrits et les présentations, les chercheurs doivent également fournir des informations et des résultats visant à répondre aux questions de recherche et aux préoccupations initiales des partenaires, et aider ces derniers à préparer une synthèse des résultats selon leur propre perspective. Il peut notamment s’agir :

  • D’une synthèse des résultats du point de vue du partenaire. La question de recherche ou la perspective du partenaire peuvent être très différentes de celles d’un chercheur universitaire. Il est possible, par exemple, qu’il soit moins intéressé par les mécanismes et autres aspects sous-jacents des comportements humains, et davantage par l’impact de son programme et la manière dont il peut en optimiser le fonctionnement ou mieux répartir ses ressources limitées. 
  • D’une liste de points à aborder pour aider le partenaire dans sa communication externe. Suite à une nouvelle publication, il est possible que le partenaire reçoive des demandes de renseignements de la part de ses administrés, d’agences de presse ou de bailleurs de fonds. Lui fournir une liste de points à aborder peut lui donner les outils nécessaires pour y répondre efficacement et réduire la charge de travail liée à la préparation de ces réponses. 
  • D’une aide à la création de documents écrits, de visualisations ou de graphiques destinés aux organes de presse, aux bailleurs de fonds, aux participants ou à d’autres parties prenantes externes. S’il est possible que le partenaire décide d’ajouter des éléments de contexte ou un contenu éditorial qui se situent en dehors de la zone de confort des chercheurs universitaires, l’implication de ces derniers peut néanmoins contribuer à offrir une représentation fidèle des résultats scientifiques.

« Expliquez clairement et sans détour les résultats obtenus et ce qu’ils signifient dans le domaine de compétence des décideurs politiques, tout en restant suffisamment neutre pour éviter tout parti pris – ou toute apparence de parti pris – et pour respecter les règles en matière de lobbying » (« Connecting Research To Policy », 2018)

Politiques d’embargo

Franz J. Inglefinger, rédacteur en chef du New England Journal of Medicine, a défini la règle d’Ingelfinger dans un éditorial (« Definition of Sole Contribution » 1969). Bien qu’elle soit parfois interprétée de manière légèrement différente d’un rédacteur en chef à l’autre, les revues biomédicales américaines respectent toutes cette règle (« Uniform Requirements » 1991), qui a deux objectifs principaux :

  • Empêcher les médias de couvrir des résultats qui n’ont pas encore été publiés dans une revue à comité de lecture
  • Empêcher les chercheurs de publier un même article dans plusieurs revues à comité de lecture

Cette règle n’a pas vocation à limiter les présentations en conférence ni les échanges entre chercheurs (y compris les partenaires de mise en œuvre) 

« Tout d’abord, nous exemptons de la règle d’Ingelfinger toutes les présentations effectuées dans le cadre de rencontres scientifiques et tous les résumés publiés, ainsi que toute couverture médiatique de ces présentations. Cependant, nous recommandons vivement aux auteurs de ne pas partager d’autres informations,notamment des figures et des tableaux, en dehors de ce qu’ils ont présenté à leurs pairs scientifiques dans le cadre de ces réunions » (Angell et Kassirer 1991).

D’autres politiques sont documentées dans les « Exigences uniformes », également connues sous le nom de « style Vancouver ». Ces exigences permettent également l’instauration d’un dialogue académique :

« Il ne s’agit pas non plus d’empêcher l’évocation d’un article présenté lors d’une rencontre scientifique s’il n’a pas été publié dans son intégralité dans les actes de la conférence ou autre publication similaire. Les articles de presse sur ce type de conférence ne sont généralement pas considérés comme des infractions à cette règle, à condition qu’ils ne fournissent aucune donnée supplémentaire et ne reproduisent pas les tableaux et illustrations » (« Exigences uniformes » 1991).

Si les résultats sont particulièrement urgents ou pertinents pour les politiques publiques, les chercheurs peuvent envisager de demander à leur revue cible s’il est possible de prendre des dispositions spéciales pour permettre aux décideurs politiques ou aux journalistes de prendre connaissance des résultats avant leur publication (« Connecting Research To Policy » 2018).

Les composantes de la stratégie de communication

La mise au point d’un plan de communication entre les chercheurs et leurs partenaires dès les premiers stades du projet permet de poser les bases d’une relation fondée sur la compréhension mutuelle et le consensus et peut éviter les tensions dues à un décalage entre les attentes des uns et des autres. En plus de discuter de leur stratégie de communication lors de réunions ou d’appels téléphoniques, les équipes peuvent décider de formaliser ce plan en rédigeant une note écrite. Documenter les attentes du partenaire vis-à-vis des variables d’intérêt et des résultats attendus peut favoriser la productivité des échanges sur les résultats de la recherche en réduisant les risques de dérive progressive des objectifs ou de la mission du projet. 

Un plan de communication et de suivi des résultats peut notamment inclure :

  • L’identité des personnes qui auront accès aux éléments suivants :
    • Assignations de traitement
    • Résultats au niveau de l’individu ou de l’unité d’étude
    • Derniers résultats agrégés en date
    • Données relatives à l’inscription au programme
    • Données de suivi ou données de processus
  • Quels résultats vont être partagés pendant l’étude, à quel moment et avec qui :
    • Calendrier de partage des résultats
    • Résultats à communiquer
    • Parties prenantes externes à envisager (ou à soumettre à un embargo) : médias, fournisseurs de données, bailleurs de fonds, participants
    • Calendrier du processus de publication académique et son impact sur le calendrier de communication externe 
    • Tailles d’effet acceptables selon la littérature ou les précédents programmes 
  • Justification ou description des éléments suivants :
    • Le fait que certains membres de l’équipe de recherche ou que les partenaires ne soient pas informés de l’assignation du traitement ou des variables d’intérêt
    • Ce qu’il est raisonnable de déduire des « résultats intermédiaires »
    • L’importance d’aller au bout de la période prévue pour l’étude
    • L’importance d’atteindre les objectifs en matière d’inscription et de recrutement 
    • L’importance de signaler tout changement relatif au programme
  • Accord sur les motivations de l’étude et la définition de la « réussite » du projet :
    • Les questions de recherche du partenaire et du chercheur. Par exemple, un partenaire de mise en œuvre peut chercher à savoir si son programme fonctionne, là où un chercheur universitaire veut comprendre pourquoi les individus participent ou réagissent d’une certaine manière, ou se pencher sur des questions théoriques plus larges. 
    • Les variables de résultat auxquelles le partenaire attache une importance particulière, définies le plus spécifiquement possible. Par exemple, dans le cadre d’un programme d’éducation, il peut s’agir du nombre de crédits universitaires obtenus, de l’obtention d’un diplôme, du nombre d’années d’études, du salaire de départ, etc. 
    • Les variables de résultat auxquelles le chercheur attache une importance particulière, définies le plus spécifiquement possible. 
  • Accord sur les publications scientifiques et autres publications :
    • Le partenaire a-t-il le droit de consulter les manuscrits avant leur publication afin de vérifier que des informations confidentielles n’ont pas été divulguées par inadvertance ?
    • Confirmer que les chercheurs ont le droit de publier les résultats et qu’ils sont libres d’accepter ou non toute suggestion du partenaire concernant les informations confidentielles, la description du programme ou l’interprétation des résultats.
    • Préciser si le partenaire restera anonyme ou s’il sera identifié, et sous quelles conditions (par exemple « une grande université » vs. « le MIT »).
    • Lignes directrices en matière d’identité visuelle et d’approbation des documents et autres éléments destinés au grand public, comme les éléments graphiques du projet, le programme des événements et les notes de recherche et de politique.

Last updated March 2021.

These resources are a collaborative effort. If you notice a bug or have a suggestion for additional content, please fill out this form.

Acknowledgments

Nous remercions Mary Ann Bates, Amy Finkelstein, John Floretta, Sara Heller, Sally Hudson, Rohit Naimpally, Jim Sullivan, Anne Thibault, Magdelena Valdes et Bridget Wack pour leurs analyses et leurs contributions précieuses. Ce document a été relu et corrigé par Chloe Lesieur, et traduit de l’anglais par Marion Beaujard. Le présent travail a pu être réalisé grâce au soutien de la Fondation Alfred P. Sloan et d'Arnold Ventures.

    Additional Resources
    Informations et exemples sur la règle d’Ingelfinger et les politiques d’embargo ;
    1. Politique d’embargo de Nature

    2. Politique de publication préalable et d'embargo du NEJM

    3. Uniform Requirements for Manuscripts Submitted to Biomedical Journals, 1991. Ce rapport, publié par l’International Committee of Medical Journal Editors, décrit les exigences standard qui s’appliquent aux manuscrits soumis aux revues biomédicales.

    4. The Ingelfinger Rule Revisited, 1991. Éditorial expliquant dans quels cas et pour quelles raisons le NEJM applique la règle d’Ingelfinger.

    Angell, Marcia, and Jerome P. Kassirer. 1991. “The Ingelfinger Rule Revisited.” New England Journal of Medicine 325 (19): 1371-73. https://doi.org/10.1056/NEJM199111073251910.

    Borg Debono, Victoria, Lawrence Mbuagbaw, and Lehana Thabane. 2017. “Sharing Interim Trial Results by the Data Safety Monitoring Board with Those Responsible for the Trial’s Conduct and Progress: A Narrative Review.” Trials 18 (March). https://doi.org/10.1186/s13063-017-1858-y.

    “Connecting Research To Policy: Community Collaboration, Policy-Relevant Findings, And Insights Shared Early And Often.” 2018. Health Affairs Blog, April. https://www.healthaffairs.org/do/10.1377/hblog20180403.254308/full/.

    “Embargo: Authors & Referees @ Npg.” n.d. Consulté le 12 avril 2018. https://www.nature.com/authors/policies/embargo.html.

    “Definition of Sole Contribution.” 1969. New England Journal of Medicine 281 (12): 676-77. https://doi.org/10.1056/NEJM196909182811208.

    Glennerster, Rachel. 2015. “What Can a Researcher Do to Foster a Good Partnership with an Implementing Organization?” Running Randomized Evaluations: A Practical Guide (blog). April 9, 2015. http://runningres.com/blog/2015/4/8/what-can-a-researcher-do-to-foster-a-good-partnership-with-an-implementing-organization.

    Murray, Brittany, Elsa Falkenburger, and Priya Saxena. 2015. “Data Walks: An Innovative Way to Share Data with Communities.” Urban Institute. https://www.urban.org/research/publication/data-walks-innovative-way-share-data-communities/view/full_report.

    National Commission for the Protection of Human Subjects of Biomedical and Behavioral Research, Md. 1978. 
    The Belmont Report: Ethical Principles and Guidelines for the Protection of Human Subjects of Research.” Superintendent of Documents.

    “Uniform Requirements for Manuscripts Submitted to Biomedical Journals.” 1991. New England Journal of Medicine 324 (6): 424-28. https://doi.org/10.1056/NEJM199102073240624.

    In this resource