Raccordement à l’eau des ménages à Tanger, au Maroc
- Urban population
- Families and households
- Citizen satisfaction
- Diarrhea
- Water quality
- Housing and neighborhoods
- Water, sanitation, and hygeine
Les ménages de Tanger, au Maroc, acceptent volontiers de payer pour avoir l’eau courante. Tandis que ce raccordement à domicile n’a aucun impact sur les maladies liées à l'eau, le bien-être déclaré par les ménages augmente de façon significative.
Policy issue
Les ménages des pays en développement passent un temps considérable à s’approvisionner en eau. Personne n'échappe à cette tâche au sein d'un ménage, mais dans de nombreux pays, ce sont surtout les femmes et les filles qui en ont la charge. Ce fardeau génère beaucoup de stress et des tensions importantes, à la fois à l’intérieur des familles et entre elles. La plupart des interventions destinées à raccorder les ménages pauvres aux réseaux d’eau potable ont pour objectif principal l’amélioration de la santé. Cependant, au-delà de son impact direct sur la santé, un accès amélioré à l’eau pourrait surtout avoir d’importants effets sur le bien-être des ménages. Le raccordement à l’eau peut mener à une meilleure qualité de vie : le temps auparavant consacré à l'approvisionnement en eau est investi dans des loisirs ou des activités productives (travail rémunéré ou éducation), de plus une importante source de stress et de tensions est éliminée. Toutefois, cela pourrait également mener à une diminution du bien-être : les femmes n'ayant pas d'autre occasion de sortir de chez elles se verraient alors privées, par ce raccordement à domicile, d’une source importante de socialisation, ceci pouvant réduire leur qualité de vie.
Context of the evaluation
Dans le Maroc urbanisé, lieu de cette étude, les ménages dépendants des fontaines publiques passent plus de sept heures par semaine à collecter de l’eau, malgré une densité relativement élevée de points d'eau. Dans notre échantillon, 65 % des ménages dépourvus de raccordement à l’eau déclarent que l’eau est une source majeure de préoccupation, 15 % ont déjà eu un conflit relatif à l’eau au sein de leur famille et 12 % avec leurs voisins. Ainsi, l’eau semble être la principale source de stress et de tensions, à la fois au sein des familles et entre elles.
Details of the intervention
In 2007, Amendis, the local affiliate of Veolia Environnement, an international, private utility company, launched a social program that offered low-income households in Tangier, Morocco a chance to get an in-home connection to the city water system. Amendis identified three zones to work in, and then a team surveyed households within those areas to find those that were not connected to the city water system. Almost 60 percent of unconnected households relied on public taps for their water. Of the households relying on the public taps, about one in five lived close enough to the public tap to use a hose to fill water containers, but the rest had to take their containers to the public tap. Households that filled containers at the public taps spent more than seven hours a week collecting water. The 40 percent of households not getting their water from the public taps were using a neighbor’s connection; these informal connections are technically illegal, but often overlooked.
Amendis offered low-income households in the three zones a chance to buy a connection to the water and sanitation network at full price, but on interest-free credit. Depending on the zone’s distance from the water grid, households in that zone were offered a three, five, or seven-year loan that would be paid off at MAD 105 (US$15) per month with their monthly water bill. This is a substantial expense for these households: at the time, the minimum hourly wage in Morocco was MAD 9.6, and this likely overestimates the average wage among these low-income households as a majority of individuals were either casual workers or unemployed.
Group | Loan offer | Encouragement |
Treatment | Interest-free loan from Amendis to buy a water connection, paid back at MAD 105 per month over three, five, or seven years |
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Comparison | Interest-free loan from Amendis to buy a water connection, paid back at MAD 105 per month over three, five, or seven years | No application assistance given. |
Because both the treatment and comparison groups were eligible for the loan program, the researchers used a randomized encouragement design to evaluate the impact of the program. The assistance that treatment group households received in applying for a connection made them much more likely to buy a water connection. The difference in the proportion of people that enroll in the program in the treatment and comparison groups enables researchers to estimate the impact of the program.
Households were surveyed in 2007, before the start of the program, and again in 2008, five months after the water connections were installed in treatment households that enrolled. Information was collected on household socioeconomic characteristics, health, hygiene practices, water collection, work and work-related conditions, time use, and social networks. In a random subset of households, the water was tested for levels of chlorine and the presence of E. coli. Households with children under 15 years old were asked to fill out a month-long “illness diary” to track instances of fever, vomiting, or diarrhea in the children, and children’s school participation was also tracked with surveys.
In January 2009, all comparison-group houses were informed about the program, including information on the various procedures required to apply for it, as part of a survey debrief. Administrative data on in-home water connection applications was obtained in August of 2009 to find out whether comparison-group houses had subsequently applied for a connection.
Results and policy lessons
La campagne d’information doublée de l’assistance administrative a augmenté de façon considérable le nombre de personnes ayant demandé un raccordement. Six mois après la campagne d’information, 69% des ménages du groupe test avaient acquis un branchement au réseau d’eau, contre 10% seulement des ménages du groupe témoin.
Les ménages apprécient leur branchement individuel. La différence de prix entre les zones a eu peu d’effet sur le nombre de postulants. Trois ans après, aucun ménage n’a eu l’eau coupée à cause d’un défaut de paiement du raccordement ou de la consommation et 44% des foyers avaient remboursé leur crédit.
Raccorder les maisons au réseau d’eau a entraîné une augmentation de l’eau consommée par les familles. Les ménages du groupe test étaient plus susceptibles d’indiquer qu’ils avaient assez d’eau pour se laver (+20 points de pourcentage) et pour nettoyer (+16 points de pourcentage).
Être raccordé n’a pas eu d’impact sur la qualité de l’eau potable ou sur la santé des ménages. Les taux de coliformes fécaux sont les mêmes dans les 2 groupes. C’est probablement la raison pour laquelle il n’y a pas d’impact sur les maladies transmises par l’eau, chez les enfants comme chez les adultes. Cela montre que, dans ce contexte, la quantité d’eau disponible n’est pas décisive pour la santé.
Les branchements individuels à l’eau ont permis aux familles de gagner beaucoup de temps; les heures dégagées ont surtout été transformées en activités de loisirs. Pour les familles du groupe test, la demi-heure quotidienne passée à aller chercher l’eau a quasiment disparu. Le temps gagné n’a pas servi à augmenter celui des activités de production, (travailler, créer une activité, ou pour les enfants, faire leurs devoirs). En conséquence, ce programme n’a eu aucun effet sur le revenu familial ou sur la scolarité. Globalement, les familles ont utilisé ce temps gagné pour des activités de loisirs (regarder la télévision, rencontrer des gens).
Être raccordé au réseau d’eau a réduit les conflits et globalement amélioré la qualité de vie. Dans le groupe témoin, 16% des ménages avaient des conflits familiaux liés à l’eau, et 12% des disputes avec leurs voisins à ce sujet. Ces tensions ont quasiment disparu dans le groupe test. Les branchements ont aussi amélioré la perception de leur qualité de vie par les ménages raccordés: le nombre de ménages indiquant que leur vie était meilleure que l’an passé a presque doublé (de 23 à 44%).
Les ménages témoins ayant des voisins bénéficiant d’un branchement individuel sont plus susceptibles de demander leur raccordement. 18 mois après la campagne d’information et 8 mois après la réunion d’information, 33% des ménages témoins ayant un foyer test à moins de 20 mètres de chez eux étaient raccordés, contre 15% des ménages sans proches voisins appartenant au groupe test.
Les familles ont beaucoup apprécié d’avoir un accès à l’eau plus confortable et plus facile. Les ménages de Tanger ont été prêts à payer beaucoup pour une quantité d’eau accrue et un meilleur confort. Même si les personnes n’ont pas utilisé le temps gagné pour des activités de production, ce temps supplémentaire ainsi que la baisse du stress liée à la collecte de l’eau ont amélioré le niveau de bien-être auto-rapporté par les ménages. Ceci peut signifier qu’en cas d’investissements importants entrepris pour raccorder des villages à l’eau potable, les ménages seront peut-être disposés à payer une partie des frais du branchement individuel, ce qui augmenterait beaucoup le rendement social de ces coûts fixes.
Faciliter l’accès au crédit pourrait permettre aux ménages d’investir plus pour améliorer leur qualité de vie. Les ménages ne peuvent pas payer d’avance, mais pourraient payer par mensualités.
Donner des informations sur les avantages disponibles et aider pour les démarches administratives sont des facteurs importants permettant d’assurer l’accès aux services. Compte tenu de l’amélioration importante du bien-être des ménages après l’installation du robinet, il est impressionnant de constater que ce simple «coup de pouce» ait eu un effet aussi important sur la participation au programme d’Amendis. Cela peut être dû soit au manque d’information sur le programme de crédit, soit au fait que les ménages ne sont pas capables de surmonter les obstacles administratifs liés au programme. Ainsi, donner accès à un crédit mais également simplifier le processus d’inscription (ou aider à ces démarches) pourrait fortement augmenter le désir des familles à investir dans un raccordement à l’eau.
Les relations sociales sont une source importante d’apprentissage. Les ménages témoins étaient plus susceptibles de se raccorder lorsqu’ils voyaient les avantages obtenus par leurs voisins déjà branchés. De même, au Kenya, les ménages ayant reçu gratuitement une moustiquaire imprégnée avaient plus de chances d’en acheter une ensuite, tout comme leurs voisins, probablement parce qu’ils avaient découverts les avantages du produit (voir le Bulletin J-PAL: “Pourquoi Payer ?”).