Efficacité et recherche de rente au niveau local, en Inde
- Politicians and electoral candidates
- Social service delivery
- Transparency and accountability
- Diversity quotas
Policy issue
Les législateurs et les ONG des pays en développement luttent souvent pour mettre en place des politiques publiques nationales efficaces répondant aux besoins d’une population variée. Les gouvernements locaux décentralisés, plus que le gouvernement central, peuvent être un bon moyen de faire émerger les préférences des électeurs et de fournir des services personnalisés, mais ils ont plus de chance également d’être captés par les élites locales ou par des groupes politiques puissants, rendant plus difficile pour les plus défavorisés l’accès aux services publics. Pour corriger ce déséquilibre, beaucoup plaident pour l’augmentation du pouvoir de négociation des groupes défavorisés en imposant leur représentation politique au niveau local. Mais cette politique de quotas augmente-t-elle réellement le partage des biens publics attribués aux régions marginalisées ?
Context of the evaluation
L’Inde est un des pays ayant adopté des politiques de quotas, imposant la représentation des castes les plus basses aux sièges d’élus dans les conseils de village. En 1993, un amendement à la constitution indienne a institué qu’un pourcentage proportionnel à la population des sièges de "maires"dans les conseils locaux soit réservé aux membres des « castes et des tribus répertoriées », plus connues sous le nom d’intouchables. Ces conseils de village contrôlent l’attribution des fonds pour les projets d’infrastructures locales, tels que la construction et la maintenance des systèmes d’eau potable et d’irrigation, la construction des routes, l'entretien des écoles et bâtiments publics.
Un système légal a été mis en place pour sélectionner aléatoirement des villages dans lesquels le siège de "maire" serait réservé à des membres des castes les plus basses. Dans le district de Birbhum, au Bengale occidental, 35% de la population appartient aux castes les plus basses, ainsi, 34% des conseils de village devaient élire un "maire" issu de ces castes. Cette politique de quotas a eu un impact important, puisque seuls 7,5% des conseils hors quota ont élu un président de basse caste.
Details of the intervention
Grâce au système de choix aléatoire des villages mis en place par l'Etat, les chercheurs de J-PAL ont pu développer une expérimentation pour déterminer si les "maires" de basse caste investissaient dans des biens publics différents ou s'ils les installaient dans des régions habitées par des individus de basses castes.
En 2000, les chercheurs ont mené une enquête dans presque tous les 161 conseils de village de Birbhum. Tout d’abord, un entretien était mené avec le "maire", sur ses origines et son expérience préalable, ainsi que sur les activités entreprises depuis les dernières élections ayant eu lieu 1998.
Ensuite les chercheurs enquêtaient dans trois villages appartenant au même conseil : deux sélectionnés aléatoirement et celui où vivait le "maire". Pendant l’entretien, les chercheurs aidés de 10 à 20 villageois, dessinaient au sol une carterépertoriant les infrastructures présentes dans le village. Ils demandaient ensuite si chacun des équipements disponibles avait été construit ou entretenu depuis les dernières élections, en notant le lieu de chaque investissement. Ces données ont été comparées avec les informations sur la localisation des services publics dans ces villages avant l’élection de 1998,date à laquelle cette politique des quotas a été introduite pour la première fois.
Results and policy lessons
Impact sur les services publics: les villages gérés par des "maires" des castes répertoriées ont construit en moyenne 10% de plus de projets d’infrastructure dans les zones habitées par des personnes issues des basses castes, en comparaison avec les mêmes zones des villages n'ayant pas fait l'objet de la politique de quotas. Seule exception: les centres d’enseignement informels (sortes d'écoles privées), pour lesquels rien n'a changé. Ainsi, la représentation au niveau local des basses castes permet d'augmenter la part des biens publics reçus par ces groupes.
Les conseils sans quota investissent des montants différents dans des biens différents, mais cette distribution est restée quasiment inchangée avant et après le passage de l’amendement constitutionnel. La fourniture de services d'irrigation et d'éducation était plus faible dans les zones habitées par des personnes issues de basse caste que dans celles habitées par des personnes issues de haute caste. L’eau potable et les centres éducatifs informels étaient fournis de la même manière dans les deux groupes, et les communautés de basse caste ont bénéficié de meilleurs services d'assainissement.
Impact sur l’attribution des services publics dans le village du "maire": si le conseil de village n’était pas visé par le quota, il y avait 40% de chance supplémentaire pour que le "maire" actuel vienne du même village que son prédécesseur. Cet effet était inverse pour les villages visés par le quota, où le "maire" actuel avait 30% moins de chances de venir du même village que son prédécesseur par rapport aux villages sans quota. Dans tous les conseils, le village du "maire" n’avait pas plus de chances que les autres villages de recevoir des biens publics.
Duflo, Esther, Greg Fischer, and Raghabendra Chattopadhyay. "E?ciency and rent seeking in local government: Evidence from randomized policy experiments in India." Working Paper, MIT, February 28, 2005.