CONSULTATIONS MÉDICALES GRATUITES POUR LES JEUNES DEMANDEURS D’EMPLOI EN FRANCE
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Une mauvaise santé physique ou mentale peut empêcher les jeunes d'acquérir leur indépendance financière, car il est plus difficile de trouver du travail lorsque l'on est malade. Les chercheurs se sont associés à cinq missions locales afin de déterminer si un suivi médical à destination des jeunes renforçait l'utilisation des soins de santé et leur couverture par l'assurance maladie et si cela permettait ainsi une amélioration de leur état de santé et de leur situation professionnelle.
Le fait d'encourager les jeunes à rencontrer un travailleur social et un médecin a entraîné une augmentation du nombre de bénéficiaires de l'assurance maladie universelle publique. En revanche, cela n'a pas amené chez les jeunes une amélioration significative de la compréhension de leurs droits et des démarches de remboursement des soins. Le programme a pratiquement doublé le nombre de jeunes suivis par un psychologue et a augmenté le temps de participation à des programmes de formation professionnelle.
Policy issue
Une mauvaise santé physique ou mentale peut empêcher les jeunes d'acquérir leur indépendance financière, dans la mesure où il est plus difficile de trouver du travail lorsque l'on est en mauvaise santé.1 D'autre part, les individus à faibles revenus présentent un risque plus élevé de tomber malade, ont tendance à moins recourir aux services de soins et ont généralement un mode de vie moins sain.
Plusieurs obstacles empêchent les jeunes défavorisés d'accéder et de recourir aux soins de santé. Souvent confrontés à d'importantes contraintes financières, ils ont en général des difficultés à régler les soins. Une étude récente menée par deux chercheurs affiliés à J-PAL a montré que fournir une assurance maladie gratuite aux adultes à faibles revenus augmentait leur demande de soins de santé.
Un manque de connaissance du système de santé, une méfiance vis-à-vis des professionnels et des établissements de santé, ainsi qu'une sous-estimation des risques sanitaires font partie des autres obstacles potentiels. Le fait d'améliorer l'information sur les possibilités d'accès aux soins et d'encourager l'utilisation des services de santé peut-il aider les jeunes défavorisés à surmonter ces difficultés ainsi que renforcer leur recours aux soins de base, leur état de santé et, à terme, leurs perspectives d'emploi ?
Context of the evaluation
En France, chacun a accès à l'assurance maladie, soit par la sécurité sociale, dont peuvent bénéficier tous les ménages comptant au moins un membre salarié ou travailleur indépendant qui paie des cotisations sociales, soit à travers la Couverture Maladie Universelle (CMU), proposée gratuitement ou à un prix modique aux ménages défavorisés. La CMU rembourse une partie des dépenses de santé (consultations médicales, médicaments, etc.), le reste étant à la charge du patient. Les ménages à faibles revenus peuvent également demander à bénéficier de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C), laquelle donne droit à une prise en charge intégrale des dépenses de santé.
Selon une étude récente, en dépit de cette possibilité de bénéficier d'une assurance maladie universelle, les jeunes à bas revenus présentent une faible probabilité de recourir aux soins de santé de base et sont plus touchés par les maladies physiques et mentales que les jeunes plus aisés.2
Pour tenter de résoudre ce problème, les ministères français de l'Emploi et de la Santé encouragent les missions locales (associations à but non lucratif financées par l'État et mettant en œuvre des programmes d'accompagnement vers l'emploi pour les jeunes défavorisés) à favoriser l'accès aux soins en informant les jeunes sur l'assurance maladie et leurs droits en la matière, en présentant des pratiques sanitaires préventives et en effectuant un suivi médical afin de déceler et de traiter les problèmes de santé. Certaines missions locales ont ainsi embauché du personnel médical ou noué des partenariats avec des établissements de santé locaux.
Details of the intervention
Les chercheurs ont évalué si ce suivi médical à destination des jeunes permettait d'augmenter la couverture de l'assurance maladie et l'utilisation des soins de santé, et ainsi d'améliorer la santé et la situation professionnelle. Dans cette optique, ils se sont associés à cinq missions locales qui avaient embauché des travailleurs sociaux ou du personnel médical dans le but de fournir ces services aux jeunes bénéficiaires de leur accompagnement.
Le programme ciblait des jeunes de 16 à 25 ans ayant un faible niveau d'instruction et présentant un risque élevé d'être confrontés à des difficultés financières. Les jeunes éligibles s'étaient récemment inscrits au sein d'une des missions locales et s'y étaient rendus au moins deux fois. Les 1 528 individus de l'échantillon ont été répartis aléatoirement dans trois groupes :
Travailleur social uniquement: les jeunes étaient invités à rencontrer un travailleur social au sein de la mission locale. Celui-ci leur donnait des informations sur l'assurance maladie et leurs droits en la matière, déterminait s'ils jouissaient d'une couverture maladie complète et leur détaillait le fonctionnement du système. Lorsque les participants étaient dépourvus d'assurance maladie, le travailleur social leur indiquait comment remédier à cette situation.
Travailleur social + médecin: les jeunes étaient invités à rencontrer le travailleur social, mais également un médecin exerçant au sein de la mission locale. Le médecin était chargé de déceler les éventuels problèmes de santé, d'adresser les jeunes à des spécialistes au besoin, et de leur transmettre de bonnes pratiques sanitaires.
Groupe témoin: les jeunes ne recevaient aucun encouragement à rencontrer un travailleur social ou un médecin, mais ils avaient accès aux services classiques proposés dans le cadre de la mission locale (généralement un accompagnement vers l'emploi personnalisé).
Les travailleurs sociaux et les médecins pouvaient mettre en place à leur guise des entretiens de suivi au cours d'une période d'un an. Les chercheurs ont recueilli des informations sur la couverture maladie, l'état de santé perçu, l'utilisation des soins, le comportement en matière de santé ainsi que la situation professionnelle au début de l'étude et après douze mois.
Results and policy lessons
Les deux interventions ont augmenté le nombre d'inscriptions à l'assurance maladie universelle publique, mais n'ont pas influé de manière significative sur la connaissance que les jeunes avaient de leurs droits et des démarches de remboursement. L'intervention « Travailleur social + médecin » a pratiquement doublé le nombre de jeunes suivis par un psychologue et a augmenté le temps de participation à des programmes de formation professionnelle.
Observance: la plupart des participants ont rencontré le travailleur social ou le médecin qu'ils étaient invités à rencontrer : 82 % des jeunes du groupe « Travailleur social uniquement » ont rencontré le travailleur social, et 67 % des jeunes du groupe « Travailleur social + médecin » ont rencontré le médecin et le travailleur social.
Couverture maladie: les participants invités à rencontrer un médecin et/ou un travailleur social présentaient une probabilité supérieure de demander la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) (25 % contre 19 % dans le groupe témoin). Aucune de ces interventions n'a eu d'incidence significative sur leur connaissance des démarches de remboursement.
Utilisation des soins de santé: la proportion de jeunes ayant consulté un psychologue était près de deux fois supérieure dans le groupe « Travailleur social + médecin » par rapport au groupe témoin (17 contre 9 %). En revanche, les interventions n'ont eu aucun effet sur le nombre de rendez-vous pris chez d'autres spécialistes ou sur la santé perçue des participants. La présence de médecins a cependant permis une amélioration des comportements de santé : en effet, les jeunes qui en ont bénéficié avaient plus de chances d'avoir un médecin traitant et d'utiliser des moyens de contraception.
Retombées en matière d'emploi: les jeunes du groupe « Travailleur social + médecin » ont passé plus de temps à participer à des programmes de formation professionnelle (neuf semaines en un an en moyenne contre sept dans le groupe témoin, soit deux semaines supplémentaires). Ni l'un, ni l'autre des programmes n'a eu d'effet sur le taux d'emploi ou sur le nombre de journées travaillées.